L'audience vient de débuter lundi quand Mehdi Nemmouche annonce "une déclaration préalable": "Je n'ai jamais été le geôlier des otages occidentaux ni d'aucun autre" en Syrie, lance-t-il à l'ouverture de son procès devant la cour d'assises spéciale de Paris.
Mehdi Nemmouche, 39 ans, sweat noir, cheveux bruns coiffés au gel, rasé de près, est accusé d'avoir été le geôlier des quatre journalistes français, Nicolas Hénin, Didier François, Edouard Elias et Pierre Torres, détenus pendant près d'un an par le groupe jihadiste Etat islamique en Syrie en 2013.
Ils ont pris place dans la salle d'audience sur les bancs des parties civiles face au box, à une dizaine de mètres de celui qu'ils ont "formellement" reconnu comme l'un de leurs geôliers en Syrie.
Le président Laurent Raviot demande aux accusés (trois présents, deux présumés morts en Syrie) de décliner leur identité.
"Nemmouche Mehdi, de père inconnu", répond-il debout au micro derrière la vitre, visiblement à l'aise, débit de voix précipité et gestes amples.
"Et je vais faire une déclaration préalable", annonce-t-il sans laisser le choix à la cour. "Je n'ai jamais été le geôlier des otages occidentaux".
"On verra ça plus tard", répond le président.
"Je n'ai jamais été le geôlier des otages occidentaux ni d'aucun autre. Et je n'ai jamais rencontré ces personnes en Syrie", poursuit-il, assurant n'avoir été qu'un "soldat sur le front" pour différents groupes jihadistes "contre les forces de Bachar al-Assad".
"La première fois que j'ai vu Nicolas Hénin, c'était devant la cour d'assises de Bruxelles", ajoute l'accusé.
Mehdi Nemmouche a été condamné à la perpétuité en 2019 pour l'attaque au musée juif de la capitale belge. Premier d'une longue série de jihadistes de l'EI à rentrer de Syrie pour commettre un attentat, Mehdi Nemmouche y avait abattu quatre personnes le 24 mai 2014.
Quand il est arrêté quelques jours plus tard à Marseille, sa photo est publiée dans la presse.
"Réparer"
Cela fait tout juste un mois que les journalistes sont rentrés en France et Nicolas Hénin appelle directement la DGSI pour dire qu'il pense avoir reconnu l'un des geôliers.
En voyant d'autres images, en entendant sa voix, les otages sont ensuite sûrs à "100%" : Mehdi Nemmouche est "Abou Omar", l'un de leurs geôliers "bavard", "pervers", "sadique" qui leur chantait Aznavour, menaçait de les égorger ou torturait des détenus syriens toute la nuit.
Ils avaient été enlevés en juin 2013, comme 25 journalistes et humanitaires occidentaux au total, souvent détenus ensemble.
Les Français avaient été libérés au bout de 10 mois, après des mois de supplice, entre violences physiques et psychologiques, privations de nourriture et simulacres d'exécutions.
D'autres comme le journaliste américain James Foley et l'humanitaire britannique David Haines avaient été exécutés dans des mises en scène macabres, à genoux, mains liées derrière le dos, en tenues oranges rappelant celles des prisonniers de Guantanamo.
"Je suis coupable, coupable d'avoir intégré un groupe terroriste, l'Etat islamique, coupable d'avoir côtoyé des personnes qui ont commis des crimes", déclare en s'excusant de sa voix emplie de "stress" le voisin de box de Mehdi Nemmouche, Abdelmalek Tanem, 35 ans, crâne rasé, grosse barbe fournie.
"Mais je suis innocent du fait d'être un geôlier. Je n'ai tué personne. Je n'ai jamais menacé la France et je ne voulais même pas revenir sur le sol européen", ajoute-t-il.
Le dernier accusé présent, le Syrien Kais Al Abdallah, 41 ans, chemise à carreaux bleus et blancs, est soupçonné d'avoir facilité la séquestration de Nicolas Hénin et Pierre Torres. Il jure lui aussi "n'avoir rien à voir" avec ce qu'on lui reproche.
Les ex-otages espèrent des réponses, voire un "moment de justice", comme dit Nicolas Hénin à la presse. "Un procès, c'est vraiment un moment où on vient réparer un crime" même si "on ne peut pas réparer physiquement", "faire revenir des morts".
"Donc un procès, ça ne peut que produire des symboles. Et ces symboles, ils doivent être d'autant plus beaux, d'autant plus gros, d'autant plus forts que le crime a été monstrueux".
Cet article a été publié automatiquement. Sources : ats / afp